Il est interdit d’interdire

Je ne sais pas vous, cher lectorat attentif, mais moi, quand je serai grand, je m’achèterai un van.

Pas un vulgaire camping-car en général (mal) conduit par des seniors en quête d’herbe plus verte. Non. Un van. Et pas n’importe quel van. Le California de chez VW (photo n°1). Mamma mia, quel véhicule ! Remarquez sa ligne racée, son profil effilé, son intérieur spartiate mais suffisant. Je me vois déjà au volant de mon bolide, Billy, mon Labrador chocolat, assis sagement sur le siège passager. Je sillonnerai les routes de France et de Navarre pour visiter tous ces lieux auxquels je rêve depuis que je regarde le Four de Transe à la télévision. Des plaines de la Beauce aux pavés du Nord, des cols alpins aux littoral landais, mon van dévorera le bitume. Et le soir…

Le soir, ce sera toujours le même merdier.

Avez-vous noté un détail sur les panneaux routiers qui fleurissent le long de nos nationales ? Depuis fort longtemps déjà, les préfectures et les municipalités se sont ligué (ou liguées, je ne saurai jamais) pour casser les pieds des heureux propriétaires de camping-cars. Dès qu’un petit coin sympa pouvant accueillir d’aimables voyageurs pour la nuit, se présente, il est systématiquement affublé d’un insupportable panneau interdisant tout stationnement de 22H à 6H pour les véhicules signalés par des dessins représentant une voiture, une moto et un camping-car. Même dans les coins les plus paumés, vous ne pouvez passer la nuit avec votre véhicule. Ce qui est amusant, c’est que ces abrutis de l’administration n’ont pas imaginé que les constructeurs automobiles remettraient au goût du jour le van. Or, l’image du van n’apparait pas sur le panneau, donc, ni vu ni connu j’t’embrouille, tu peux garer ton van où tu veux. Sauf, car il y a toujours un sauf.

Sauf que nos édiles se sont rendus compte de leur erreur lorsque la maréchaussée a voulu verbaliser des camping-cars qui n’en étaient pas. Les propriétaires souriaient dans leur moustache en signalant aux gendarmes diligentés, que leurs vans ne rentraient pas dans les catégories stipulées sur le panneau (comme les side-cars, les 38 tonnes et les Airbus A320). Rouges de rage, les mairies ont fait voter un budget afin de changer les panneaux (hors de prix) sur lesquels vous pouvez maintenant lire : Interdit à tous les véhicules de 22H à 6h.

Nous vivons dans un pays qui ne trouve rien de mieux à faire que d’emmerder d’inoffensifs voyageurs. Je sais ce que vous allez dire. Les camping-cars et les vans enlaidissent le paysage. Leurs propriétaires vident, sans vergogne, les toilettes chimiques, n’importe où. Les petites rues sont encombrées voire bouchées par des gros-culs dont les chauffeurs paniquent lorsqu’ils risquent de rayer la carrosserie et, ainsi, perdre leur caution. Certes, vous avez raison. Moi-même je râle contre les maisons roulantes qui prennent toute la place sur nos étroites départementales.

Mais, que voulez-vous ? L’impitoyable horloge de la vie fait grincer ses rouages à l’image des articulations osseuses de l’être humain qui voit s’éloigner les douceurs de la jeunesse au profit de celles, bien différentes, des affres de l’âge euphémiquement mûr, et les désirs des hommes se rapprochent davantage des maisons roulantes que des débauches érotiques d’un autre temps.

Pensez-y la prochaine fois que vous vous énerverez contre Ginette qui, au volant de son van VW California (photo n°1), embouteille l’avenue du général De Gaulle juste le jour où, comme par hasard, vous êtes en retard, et que vous risquez de rater la signature de ces fichus contrats. Bientôt, Ginette, ce sera vous. Si ce n’est déjà le cas.

Non, mais sérieusement.

Gifnem29

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