Je ne sais pas vous, cher lectorat attentif, mais moi, parfois, je me demande.
Comme je vous en rebats les oreilles depuis une semaine, il se trouve que j’ai intégré mes quartiers d’hiver sis à Plouescat (29N).
La résidence que j’occupe est une maison de famille. Était, plus exactement. Vu que tout le monde se fâche dans cette famille d’abrutis, seules deux personnes viennent y séjourner. Ma mère la propriétaire, en juillet et août (pas folle la guêpe), et ma pomme en novembre, décembre, mars et avril, à la louche.
La demeure a été construite en 1971, sur un terrain qui, vraisemblablement, aujourd’hui, ne recevrait jamais l’approbation de la municipalité, ni celle des affaires maritimes qui, pour ceux d’entre vous qui vivent loin de l’océan, sont des emmerdeurs. De nos jours, la municipalité avancerait la dangerosité d’une construction à proximité (35 mètres) d’une légère déclivité qui donne directement sur la plage, les affaires maritimes, payées à rien foutre, argueront qu’il ne faut pas dénaturer le paysage.
Oublions les affaires maritimes et penchons-nous sur les arguments de la ville.
En 51 ans, le terrain n’a pas du tout bougé. La mer ne l’a pas rogné, contrairement à certains voisins exposés plein ouest. Malgré tout la dernière décennie a rebattu les cartes. Beaucoup de voisins ont empierré la plage au bout de leur propriété, sans autorisation pour certains, mais je pense que la municipalité ferme les yeux car elle y voit un bienfait pour son littoral.
En revanche, le chemin qui mène chez nous longe la mer et nous sommes les seuls à utiliser le dernier tiers, à l’exception des gens qui ne savent pas déchiffrer le panneau qui indique que c’est une voie sans issue et qu’il est difficile d’y manœuvrer son véhicule. Plutôt que de dresser des PV aux incultes, la mairie a installé des poteaux afin qu’aucune automobile ne bascule sur la plage. Et ces petits bouts de bois s’avèrent de très bons témoins de l’érosion naturelle. L’un d’entre eux a chu sur le sable. En moins de dix ans, le petit espace situé juste en face de chez nous a perdu un bon mètre (sur une dizaine), et les vacanciers qui viennent se garer là malgré l’interdiction n’arrangent rien. Maintenant, la mer avance très vite. Une fois que les plantes ont disparu, plus rien n’empêche l’eau salée, et même les eaux de pluie, de grignoter ce qui, au fond, n’est que de la dune. D’ici, vingt ans, peut-être trente, tout dépend de la violence de tempêtes, nous ne pourrons plus rentrer chez nous en voiture. Bon, mon déambulateur devrait passer.
Entre le chemin et la plage, sur la quasi totalité de la distance, il y a une dune. Depuis mon enfance, lorsqu’elle était notre terrain de jeux favori, elle a réduit de moitié. On ne sait pas vraiment à qui elle appartient, mais elle est privée. Cette semaine, sur l’une des parcelles, j’ai aperçu un bulldozer. Visiblement, les propriétaires ont décidé d’aplanir leur terrain. Un véritable massacre. Ils ont certainement pensé à ne pas trop défricher côté plage, pour éviter que les tempêtes de cet hiver avalent la propriété, en revanche ils n’ont pas pensé à la pluie et aux eaux de ruissellement.
Rendez-vous dans quelques années…
Non, mais sérieusement.
© Gifnem29 – octobre 2022
Je pense à Le Clézio en vous lisant, qui s’est attiré les foudres des bien-pensants, ersatz d’écolos, en défendant un petit chemin, sur les rives de la Seine.
https://www.leparisien.fr/culture-loisirs/normandie-le-clezio-un-prix-nobel-en-guerre-contre-une-piste-cyclable-24-07-2020-8358390.php
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