Aquariophilie

Je ne sais pas vous, cher lectorat attentif, mais moi, parfois, je me demande.

Nous vivons actuellement les marées d’équinoxe de printemps. Pour ceux d’entre vous qui n’ont pas la lumière à tous les étages, les marées d’équinoxe sont des grandes marées ayant lieu deux fois par année, au début du printemps et au début de l’automne. A ces périodes, les coefficients atteignent des 110 voire 120. Autrement dit, c’est la fête de la vague. Mais pas celle des dunes.

En effet, le mouvement perpétuel de la mer ronge peu à peu les collines de sable parsemées d’oyats et de chatons. Les habitations en bord de mer observent d’un œil inquiet les millions de grains qui décident de migrer sous d’autres cieux plus cléments. Déjà, certaines demeures de la côte ont fait le grand plongeon, ce qui entraine bien des inconvénients tant au niveau de la pollution qu’à celui de l’offre immobilière. Bientôt, seuls des Russes ivres feront des propositions mirobolantes pour acquérir ces propriétés sinistrées. Ou des Chinois sobres.

Les nouveaux venus se délectent de paysage comme celui-ci.

Il s’agit de la vue qui m’agresse tous les jours. Comme vous pouvez le constater, ce cliché a été pris à marée basse. Le même, à marée haute vous surprendrait. Derrière la baie, vous verriez se mouvoir la faune maritime et les algues brunes. Bon, pas tout de suite, mais d’ici deux cents à trois cents mille ans, ce sera le cas (un copain qui vécut dans cette maison pendant quelques mois fit croire à une de ses conquêtes qu’à marée haute on voyait les poissons ; comme quoi, en Bretagne, nous n’avons pas que des prix Nobel).

Je doute que la maison supporte un tel changement environnemental, mais si c’est le cas, les futurs propriétaires disposeront d’un magnifique aquarium inversé. Ce sont les poiscailles qui viendront tapoter la vitre pour voir bouger les humains et se moqueront d’eux parce qu’ils tournent en rond dans leur maisonnette.

Non, mais sérieusement.

© Gifnem29 – bounty 2023

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Le sniper, son wok et son fusil – Chang Kuo-Li

Le sniper, son wok et son fusil – Chang Kuo-Li – Folio Policier (Gallimard)

Gallimard ! Ben mon vieux, ils doivent abuser de certaines substances chez Gaga.

Jusqu’à tout récemment, je n’avais jamais entendu parler de Chang Kuo-Li. Pourtant, il semble que cet auteur jouisse d’une renommée internationale.

Très sincèrement, j’ai eu l’impression de lire un épisode du « Transporteur » ou le scénario d’un film de Jackie Chan. Ce n’est pas mauvais, c’est ultra convenu. Un tueur au grand cœur trahi par les siens, dont le petit passe-temps est de cuisiner du riz sauté (on dirait la version asiatique de « Léon »).

J’hésite un peu à l’écrire, dans ce monde aseptisé, mais un détail m’a pas mal chiffonné. Les patronymes des personnages secondaires. Je m’y perdais complètement. Il est curieux de constater à quel point la mondialisation est une utopie lorsqu’un lecteur occidental n’est pas assez malin pour se souvenir d’une dizaine de noms à résonnance asiatique. Attention, je n’ai pas dit que tous les asiatiques se ressemblaient comme Thierry Rolland commentant un match de la Corée et, sans vergogne, assénant un magnifique : « Il n’y a rien qui ressemble plus à un Coréen qu’un autre Coréen ! »

Mais il faut bien avouer que leurs noms sont fichtrement compliqués.

Non, mais culturellement.

© Jourd’hu – mars 2023

Fond vert

Je ne sais pas vous, cher lectorat attentif, mais moi, parfois, je me demande.

Naguère, j’étais un grand amateur de cinéma. Si ma passion m’a un peu quitté, je reste fasciné par la fabrication d’un film. J’aimerais beaucoup assister à un tournage, notamment pour connaitre les astuces techniques..

Un exemple assez étonnant. Sachiez-vous que la pluie n’est pas photogénique, ou, plus exactement caméragénique. Pourtant, il pleut souvent dans les films. Pas des masses dans « Lawrence d’Arabie », je vous l’accorde. Pour que l’eau apparaisse bien, les metteurs en scène font appel aux pompiers. Les lances balancent des grosses gouttes qui impriment bien la pellicule. Vous aurez remarqué que le bruine, voire le crachin, s’invite rarement dans les comédies romantiques. Notez que c’est à peu près la même chose pour la neige. Celle du cinéma est rarement naturelle car très peu visible. Si vous regardez un peu de sport à la télé, vous savez que les averses de neige ne se voient que lors des gros plans. Tiens, puisque je parle de télé. Sachiez-vous pourquoi un même film est plus long au cinéma que sur votre petit écran (sans compter les coupures de pub bien entendu) ? Parce qu’au cinéma il est question de 24 images par seconde alors que la télé n’en diffuse que 23 (d’ailleurs si quelqu’un a l’explication, je suis preneur).

Un autre exemple assez cocasse. Sachiez-vous pourquoi les réalisateurs évitent le plus possible de filmer les roues des véhicules ? Parce que sur pellicule elles tournent à l’envers. Ou alors, ils s’arrangent pour que l’objet soit uniforme afin de ne pas gêner le spectateur.

Dernier exemple, plus sujet à caution, il paraît que, en vrai, Hulk est gris, mais le vert passe mieux à l’écran.

J’aime aussi beaucoup les anecdotes sur les acteurs.

John Wayne est, encore aujourd’hui, considéré par beaucoup (de grands-mères surtout) comme l’homme idéal. Ce sieur qui a passé l’essentiel de sa vie d’acteur le cul posé sur le dos d’un cheval détestait ces animaux. Par ailleurs, bien moins amusant, sieur Wayne était un suprémaciste (blanc) convaincu, raison pour laquelle il est toujours très adulé dans le sud des Etats-Unis. Je ne vous cache pas que ses films me plaisent moins depuis que j’ai appris cela lors d’un documentaire diffusé par Arte.

Clint Eastwood est allergique au tabac.

Jane Fonda a enfilé, une grande partie de sa carrière, des soutiens-gorge rembourrés, pour satisfaire les producteurs d’Hollywood.

Charlie Chaplin n’a jamais porté la moustache.

Marilyn Monroe était brune.

Angelina est jolie.

Yul Brynner est la parrain de Charlotte Gainsbourg.

Jean Dujardin n’a pas la main verte.

Non, mais sérieusement.

© Gifnem29 – sucettes Pierrot Gourmand 2023

Chacun chez soi

Je ne sais pas vous, cher lectorat attentif, mais moi, parfois, je me demande.

Ce soir, en zappant mollement, je suis tombé sur une émission de débiles profonds dans laquelle une jeune femme était invitée, non pas pour se plaindre de la saleté des villes, mais pour défendre ces petites bêtes que nous aimons tous, les rats.

Je ne suis pas un défenseur acharné des espèces animales, mais, globalement, je ne leur veux pas de mal.

Pourtant, j’estime que Noé est un parfait abruti.

En effet, quel intérêt avait-il à sauver les tiques, les moustiques, les morpions, les poux, les serpents, les vives, les sangsues, les crocodiles et les socialistes ? Franchement, la vie ne serait-elle pas plus agréable si ces bébêtes ne passaient pas leur temps à nous la gâcher ?

Pour les rats, je suis plus partagé. Je n’ai rien contre eux dans la mesure où ils restent chez eux. Le vrai problème avec ceux que l’on appelle les « nuisibles », c’est leur goût pour le tourisme.

Tout le monde sait que le tourisme est le fléau principal qui détruit notre planète. Or, le bilan carbone des rats est désespérant. Les rats aiment voyager. En général, ils choisissent le bateau, mais les plus aisés n’hésitent plus à se déplacer en avion. Ainsi, ils peuvent jouir des paradis tropicaux, se repaître de cocktails colorés avec un petit parasol et de gambas au safran, et se prélasser sur des transats au bord du lagon azur tout en dragouillant les souris du coin.

Par ailleurs, les rats sédentaires sont d’une grande aide pour l’espèce humaine. On l’oublie trop souvent, mais ces sympathiques rongeurs participent à l’hygiène générale. Le Parisien moyen (ou le Marseillais) ne voit que le corps poilu, un chouia repoussant et l’animal peu semblable au gentil Ratatouille. Toutefois, le rat se nourrit de déchets. Donc, s’il mange les déchets, il les fait disparaitre. Logique non ? Les villes seront vraiment dans la mouise le jour où les rats se mettront en grève. Sud-Rat réfléchit à la question.

Non, mais sérieusement.

© Gifnem29 – balisto 2023

Les défricheurs d’éternité – Claude Michelet

Les défricheurs d’éternité – Claude Michelet – Robert Laffont

Malgré ma virulente mécréance assumée, un pan de l’histoire de la religion chrétienne me fascine. Les bâtisseurs.

Que ce soit chez Vincenot avec « Les étoiles de Compostelle », chez Follett avec « Les piliers de la terre » (et ses suites), et maintenant chez Michelet avec « Les défricheurs d’éternité » (très beau titre), j’apprécie beaucoup les aventures de ces hommes (très peu de femmes, désolé #metoo) simples et courageux qui érigèrent cathédrales, églises ou cloitres. Même si l’aspect religieux de ces romans me hérissent, je reconnais que ces pionniers de l’architecture et leur foi du charbonnier, m’émeuvent. Ils appartiennent à une époque lors de laquelle la croyance religieuse relevait davantage de l’ignorance que de la stupidité. De plus, l’état de moine était une quasi certitude de ne pas mourir de faim car l’Eglise n’hésitait pas à exploiter des serfs guère mieux lotis que des esclaves. Comme quoi…

« Les défricheurs d’éternité » est un très beau roman écrit par un auteur rarement cité dans les « grands » écrivains français. Pourtant sa plume fluide et accessible devrait être davantage considérée par rapport à celle de certain(e)s qui se racontent dans des livres ennuyeux mais fort efficaces en cas d’insomnie.

Non, mais culturellement.

© Jourd’hu – mars 2023

Un dimanche après-midi sur la terre

Je ne sais pas vous, cher lectorat attentif, mais moi, parfois, je me demande.

C’est dimanche, je vais aller me promener à Roscoff. Comme tout le monde.

Roscoff, c’est un peu notre Saint-Tropez à nous. Les cagoles en moins. Quoique. Roscoff, c’est la station balnéaire la plus chic du Finistère Nord.

Aujourd’hui, c’était le premier dimanche ensoleillé de l’année. Par conséquent, Roscoff était noire de monde. Les gens viennent s’oxygéner dans ce petit port pittoresque, au milieu des voitures, des motos, des chalutiers (oui, même le dimanche) et des navettes pour l’île de Batz.

En effet, l’île de Batz se trouve juste en face de Roscoff (prononcez « Batss » si vous voulez passer pour un touriste, et « Ba » si vous voulez vous fondre dans la faune locale).

Il y a fort fort lointain, la municipalité de Roscoff décida de construire une digue qui ne servirait à rien sinon, après tout pourquoi pas, à la promenade dominicale. Ce long chemin de béton ne mène nulle part et est érigé beaucoup trop haut pour que les bateaux puissent y accoster. Comme vous le prouve cette photographie.

(vous noterez, au passage, mes immenses progrès en matière numérique ; il ne me reste plus qu’à trouver le moyen de basculer les fichiers de mon smartphone préhistorique sur mon pc ; dans deux trois ans, je devrais être au point ; en vous remerciant)

D’accord, ce n’est pas ultra net. Mon côté artiste. Je ne peux pas m’empêcher de donner du cachet à mon travail.

Bref, cette digue/promenade ne va nulle part. Au bout de 200 mètres (à un mulet près), elle descend en pente douce vers la mer. Ce qui est vraiment surprenant, c’est que, tant qu’à faire des travaux, pourquoi ne pas voter un budget un peu supérieur et prolonger la digue, qui deviendrait un pont, jusqu’à l’île de Batz. Sans doute était-ce le projet d’origine, tué en cours de route à cause des marins qui voyaient d’un très mauvais œil ce barrage artificiel qui les aurait obligés à des détours. Sans compter sur les navettes qui gagnent leur vie en transportant les touristes du continent à l’île et lycée de Versailles.

C’est dommage. Cela m’aurait bien plu de marcher jusqu’à Batz. Même lors des marées d’équinoxe, comme mercredi et jeudi prochains, il manque quelques dizaines de mètres d’estran pour aller à Batz à pieds secs.

Non, mais sérieusement.

© Gifnem29 – nounours en guimauve enrobés de chocolat 2023

Ce cher vieux Dick

Je ne sais pas vous, cher lectorat attentif, mais moi, parfois, je me demande.

Tous les ans, à la même époque, j’écoute quatre chansons.

J’ai déjà dû vous dire, au détour d’un billet, que je n’écoute presque jamais de musique en dehors de la radio dans la voiture. Il m’arrive de me rendre sur YT pour réécouter une chanson qui s’était égarée dans les limbes de ma mémoire défaillante (la dernière en date « Black velvet » d’Alannah Myles, de la bombe, dans tous les sens imagés du terme), mais cela se produit de plus en plus rarement.

Pourtant, à l’approche du printemps, la première saison, j’écoute les quatre saisons. Pas celles de Vivaldi. Celles de Richard Gotainer.

Le printemps : « Avant de voir ses yeux ».

L’été : « Youpi youpi youpi ».

L’automne : « La photo qui jaunit ».

L’hiver : « Elle est partie avec Robert ».

Quatre très belles chansons. Un mélange de poésie, de légère grivoiserie, d’humour. Un régal.

Richard Gotainer n’est jamais cité lorsqu’il s’agit de dresser la liste des grands de la chanson française. Tant mieux. Il est bien plus que cela. Un baladin, un troubadour. Trop souvent réduit à « Tu baguenaudes dans les pâturages… », il est l’auteur de très beaux textes souvent méconnus. En outre, c’est un bon comédien oublié après deux ou trois très bonnes prestations dans les années 80/90 (« Rendez-vous au tas de sable »).

Je ne fais pas partie de ceux qui vous hurlent aux oreilles « Quoi ! Tu ne connais pas ça ! », cependant je vous conseille fortement de faire quelques recherches pour écouter ces quatre chansons, et rajoutez-y « Trois vieux papi » (« un coup je jette ma casquette, un coup je vais la rechercher, disait le Dédé »), ça nettoie les esgourdes.

Vous m’en direz des nouvelles.

Non, mais sérieusement.

© Gifnem29 – kinder bueno 2023

Vixen 03 – Clive Cussler

Vixen 03 – Clive Cussler – Le Livre de poche (Lefrancq)

Clive Cussler est l’exemple type d’auteur dont je me demande, à chaque fois que son nom se trouve sous mes yeux, si je l’ai déjà lu. Sans doute est-ce dû à ce prénom si commun chez nos présidents de la république*.

En vérifiant mes riches archives, je me suis rendu compte que j’avais lu, assez récemment, « Panique à la maison blanche » et que, étrangement, cette lecture m’avait plu. Pour mémoire, ce que je recherche surtout en littérature, ce sont les raconteurs d’histoires. Les philosophes à deux balles me cassent les pieds.

Le moins que je puisse écrire, c’est que le sieur Cussler sait raconter des histoires. Elles sont invraisemblables mais peu m’importe. J’éprouve un plaisir certain à m’égarer l’esprit dans des intrigues abracadabrantesques très éloignées d’un morne quotidien.

A noter, pour ce roman, un véritable effort dans la traduction du titre original, « Vixen 03 ».

*et Clive Chirac alors ?

Non, mais culturellement.

© Jourd’hu – mars 2023

Trèfle endormi

(la rédaction de Jourdhumeur remercie ses lecteurs adorés pour l’incroyable nombre de messages destinés à souhaiter sa fête à l’un de nos collaborateurs ; ce dernier est extrêmement touché par tous les témoignages de sympathie émanant de ceux qu’il considère comme ses amis, mieux, sa famille ; ne pouvant répondre à chacun, individuellement, il profite de son exposition internationale pour exprimer sa gratitude à celles et ceux qui ont pioché dans leur temps si précieux pour lui souhaiter tout le bonheur du monde, la richesse, la notoriété, la main d’Audrey Tautou, et du talent, beaucoup de talent ; en vous remerciant)

Je ne sais pas vous, cher lectorat attentif, mais moi, parfois, je me demande.

Le 17 mars est une date importante du calendrier. Chaque année, aux quatre coins de la planète, des millions de personnes se réunissent pour célébrer le sommeil.

Selon une étude scientifique très sérieuse, nous dormons pendant vingt-cinq ans de notre vie. En admettant que nous ne mourons pas à vingt-quatre ans. Ben oui, sinon ça marche pas. Personnellement, je trouve que l’on devrait dormir ses vingt-cinq ans d’un coup. Comme ça, après, on a tout le temps qu’on veut pour faire plein de choses comme… Heu… Manger des BN, apprendre à jouer au curling, cueillir des renoncules, regarder vingt fois chaque film de Claude Lelouch, passer l’aspirateur, tapoter les coussins, errer dans les rayons bricolage et écrire des âneries (entre autres). Vingt-cinq ans de sommeil, si on suit les conseils du corps médical qui préconise huit heures de couette par vingt-quatre heures, cela signifie donc que les scientifiques nous font mourir à soixante-quinze ans. Par conséquent, j’ai le regret de présenter mes condoléances à une part, non négligeable, de mon lectorat.

Mais n’éludons pas la question essentielle : Le sommeil, quoi t’est-ce ?

D’aucuns affirment que c’est une période durant laquelle le corps se régénère afin de pouvoir supporter les difficiles journées qui attendent le maçon, la coiffeuse, l’écolier ou le retraité qui se prépare pour la sieste. En réalité, il en va tout autrement. Le sommeil est une vie parallèle. Une vie riche. Le problème étant que la majorité d’entre nous se souvient peu de ce qu’il/elle fait pendant les périodes de repos. Je rêve d’une machine qui nous permettrait de projeter nos songes sur un écran géant. Je suis convaincu que nous serions très surpris de constater à quel point notre vie ensommeillée est source d’intérêt.

Bon, pour l’instant, nous nous contentons de voler comme Superman, de rencontrer nos défunts et de gagner la coupe du monde. C’est peu.

Non, mais sérieusement.

© Gifnem29 – toblerone 2023

(presque) Toutes mes facultés

Je ne sais pas vous, cher lectorat attentif, mais moi, parfois, je me raconte.

Je suis né en octobre 1984. Le deux, je crois.

C’était le jour de la rentrée universitaire, et je naissais au monde.

A l’époque, tout étudiant subissait trois mois de « détermination ». Il fallait choisir trois disciplines pendant un trimestre, puis, suite à des évaluations, nous étions orientés vers celle dans laquelle nous avions obtenu les meilleurs résultats. Je voulais étudier l’Histoire, avec un grand H. Je me voyais bien archéologue. Pour compléter le cursus, j’optais pour l’Anglais, car ça peut toujours servir, et le Droit, juste pour rigoler.

Début janvier 1985, les résultats des partiels tombèrent. J’étais collé dans les trois matières. La suite, pour moi et les quelques dizaines de guignols qui avaient préféré la vie nocturne brestoise aux amphithéâtres de l’UBO, consistait en six mois de « remise à niveau ». La honte totale.

Un copain et moi, dans la même situation, apprîmes qu’il était possible de défendre son cas auprès des doyens de chaque département. En Histoire, ils me rirent au nez (les places étaient très chères). En Anglais, ils me firent passer un test oral supplémentaire. J’échouais lamentablement. En Droit, le doyen nous ouvrit les bras à mon pote et moi (ils disposaient d’un nombre de places extensible). Je me retrouvais donc étudiant en Droit, contre toute attente.

Le lendemain, j’assistais à mon premier cours. Du Droit civil. Au bout de dix minutes, je sus que je ne serais jamais avocat (avec ou sans crevettes). Je n’ai plus mis les pieds à la Fac, sauf pour les AG.

Je n’étais nullement politiquement engagé et me fichais royalement de l’ordre du jour. Les Assemblées Générales en Droit étaient célèbres pour quelque chose d’un peu particulier. Il suffisait de faire un peu semblant de s’intéresser et une fille ne manquait pas de venir vous parler.

J’ai discuté un petit quart d’heure avec Isabelle, puis elle m’a proposé de venir boire un café chez elle, à la cité U. Elle n’avait pas de café.

Je n’allais jamais en cours. Sauf le lundi matin de huit heures à dix heures car la peau de vache faisait l’appel. La seule de toute la Fac. J’ai passé des journées entières au cinéma et des nuits entières en discothèque. Comme les sous ne tombaient pas du ciel, j’ai mis Isabelle sur le trottoir. Non ! Je plaisante, n’appelez pas la Mondaine. D’autant que je ne me souviens pas d’avoir revu la jeune femme. Non, c’est le système D qui prévalait. Je vous ai déjà raconté comment nous nous planquions dans les cinémas pour passer d’une séance à l’autre, ou alors nous attendions à la sortie des artistes que la porte s’ouvre et nous nous faufilions discrètement. Pour les boites de nuit, c’était très simple. Soit nous dénichions des invitations, assez courantes dans les bistrots, soit nous arrivions avant minuit car alors c’était gratuit, soit je me travestissais en p’tite lady (collant rose fluorescent, mini-jupe en skaï… Qui a la référence ? J’ai rencontré le chanteur, une nuit… Pas vraiment une star, même s’il s’efforçait de boire beaucoup) car, la plupart du temps, l’entrée était gratuite pour ces dames. Comme par hasard…

Non, mais sérieusement.

© Gifnem29 – snickers 2023